Label Vie

 Un entretien avec Zouhair Bennani, président des centres commerciaux Label Vie

Yves SASSI : Pouvez-vous nous présenter votre groupe et son activité ?

Zouhair Bennani : Notre groupe, a été créé en 1985 et s'est spécialisé dès le début dans la création de supermarchés. Ce fut un choix délibéré, le Maroc n'était pas encore prêt pour les hypermarchés et il manquait de formules spécifiques liées à la distribution alimentaire de proximité.
Depuis la création nous avons ouvert 7 centres commerciaux et 5 sont en cours de réalisation. La taille moyenne de nos implantations est de l'ordre de 1.000 m². Toutes sont réalisées en centre ville.
Label Vie emploie 600 salariés et développe un chiffre d'affaires de 500 millions de Dirhams.

Yves SASSI : Quel constat pouvait-vous faire sur le marché marocain et que pouvez vous lui apporter ?

Zouhair Bennani : Je vais employer une formule un peu choc. On constate un certain cahot dans le paysage urbain et je suis convaincu que nos implantations apportent à l'environnement social et économique une réelle amélioration. Notre métier est non seulement de créer des surfaces commerciales, mais aussi nous pousse à une réflexion avancée sur l'immobilier commercial. Il est certain que ce dérèglement urbain est moins sensible en zone périurbaine, mais dans le cœur des villes, nous subissons plus que nous le voudrions.
De plus, il est clair que les échecs subis par certains intervenants proviennent d'un manque de rigueur et ils ont un effet tout à fait négatif sur l'extérieur qui pense que c'est le marché qui n'est pas prêt.
Tout ceci nous a poussé à réfléchir de façon approfondie sur les attentes des consommateurs et également sur la structure de la galerie commerçante. Nous avons été les premiers à ne pas vendre les espaces commerciaux, mais à les louer. Nous en organisons la gestion et l'animation. Ce qui donne une réelle cohérence commerciale à nos centres commerciaux. Aujourd'hui nous avons un modèle assez étonnant qui n'existe pas ailleurs... même en France. Nous avons à Rabat un centre de 7.000 m², avec 4.500 m² de commerces, dont la locomotive est le supermarché et qui attire une clientèle dite primaire. C'est un réel succès et nous voulons renouveler l'expérience.
Par ailleurs, nous sommes très sélectifs sur les enseignes qui nous accompagnent dans ces projets, afin qu'elles soient parfaitement en phase avec la cible de consommateurs. Ce type d'implantation correspond à une demande réelle du marché.
Nous estimons que ce type de projet est réalisable dans des villes de 40 à 50.000 habitants.

Yves SASSI : Quels sont vos projets d'implantation ?

Zouhair Bennani : Plusieurs opérations sont en cours de réalisation. A Meknes notamment ainsi qu'à Casablanca où nous allons ouvrir une unité assez atypique. Il s'agit de la reprise d'une opération initiée par le GRC, qui n'a jamais abouti. Le bâtiment de 2.500 m² est un ancien marché de gros, aujourd'hui classé, avec une hauteur sous plafond de 40 m. Ce sera un superbe lieu, dans lequel nous souhaitons attirer des enseignes assez traditionnelles, mais aussi une enseigne dans le domaine du loisir culturel comme Virgin ou la Fnac. Ce sera une première au Maroc
Par ailleurs, nous nous implantons à Settat. C'est également stratégique. Il faut aller là ou il y a une large clientèle et bien identifier ses besoins. Ce sont des opérations qui s'avèrent très structurantes pour les villes. Ce centre sera un peu plus modeste, mais avec une cible de clientèle parfaitement identifiée.
Autre projet, notre implantation à Marrakech… proche de la Mamounia. C'est un emplacement phare. Et là aussi, nous avons identifié des besoins particuliers des consommateurs.

Yves SASSI : Quels sont les freins possibles à votre développement ?

Zouhair Bennani : Ils sont le plus souvent d'ordre administratifs. Les délais de réponse sont trop longs. Un autre élément que l'on peut souligner, provient des échecs subis par certains acteurs qui ont refroidi les acteurs financiers.
Trop de promoteurs ont créé des opérations de toute pièce, simplement parce qu'ils disposaient de terrains. Ils n'ont pas écouté le marché, ont créé des cellules commerciales qu'ils ont voulu commercialiser. Mais quand on n'écoute pas les acteurs d'un marché, on a aucune chance de réussir son projet.
Petit à petit, le marché se structure. Un fond d'investissement vient de se créer, spécialement dédié à l'immobilier commercial, mais il est certain que le marché va mettre longtemps à se structurer. Il est nécessaire qu'une législation plus ferme se mette en place.

Yves SASSI : Comment voyez vous l'avenir de la franchise ?

Zouhair Bennani : Il ne suffit pas de rassurer les franchiseurs sur le pouvoir d'achat du consommateur marocain. Il faut structurer l'économie et le foncier. Tout cela doit s'organiser, devenir plus transparent.

Je dois dire que l'initiative de la Direction des Investissements en organisant ce Forum est tout à fait remarquable et nous avons insisté pour que les grands aménageurs soient présents pour qu'un débat s'instaure sur ce sujet très important pour la modernisation du commerce au Maroc.
Vous savez, c'est souvent le secteur privé qui impulse les grandes réformes, qui favorise les évolutions. Alors concernant le développement de la franchise, nous manquons encore de visibilité, mais c'est sans aucun doute une évolution incontournable.

Je voudrais également préciser que les candidats à la franchise et les franchisés marocains ont encore un peu de mal à s'adapter aux obligations du commerce structuré, " marketé ". Mais ils doivent prendre conscience que la réussite d'une implantation en franchise passe par le respect des règles du franchiseur. Et la réussite des galeries commerçantes passe également par le respect des obligations mises en place par le gestionnaire du centre.