Dossiers de la franchise

La Lettre du Cabinet, Décembre 2010

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Editorial

La fin de l’année 2010 est marquée par une actualité particulièrement variée.

En droit des sociétés, la Cour de cassation vient clarifier le sens de l’article 1862 du code civil en précisant qu’il ne confère aucun droit de préemption aux associés du cédant. Le régime de l’exercice des droits des actionnaires des sociétés cotées est quant à lui modifié par une ordonnance du 9 décembre et un décret du 23 décembre dont les dispositions sont applicables depuis le 1er janvier 2011.

Le droit des entreprises en difficulté offre des solutions intéressantes en ce qui concerne la notion de cessation de paiement, le délai de déclaration de créance pour le créancier établi à l’étranger et la portée du jugement de clôture pour extinction du passif.

En droit social, la Cour de cassation apporte des réponses sur des questions aussi essentielles que le licenciement économique au sein d’une unité économique et sociale et le point de départ du délai de convocation à un entretien préalable en cas de report de celui-ci à la demande du salarié.

Le droit immobilier est également le siège de décisions importantes touchant aux conditions de validité des clauses résolutoires, au privilège du bailleur d’immeuble et aux conditions d’exigibilité du paiement des charges.

D’autres questions non moins intéressantes sont abordées dans les autres domaines de notre activité, notamment en droit de la propriété intellectuelle (sur la présomption de titularité des droits d’auteur) et en droit fiscal (en ce qui concerne les aides intragroupe).
Bonne lecture et meilleurs vœux à tous.

LIBRE PROPOS

La fraude en droit des marques

La théorie de la fraude, bien connue des civilistes, n’est pas étrangère au droit des marques. Sur ce fondement en effet, il est possible de contester un dépôt effectué au détriment de l’intérêt de tiers.

La fraude est expressément visée à l’article L.712-6 du code de la propriété intellectuelle comme fondement d’une action en revendication ; elle trouve également à s’exprimer de façon plus générale en application de la maxime fraus omnia corrumpit pour faire annuler un dépôt frauduleux.

Plusieurs décisions rendues dans le courant de l’année 2010, dont notamment le jugement du TGI de Paris dans l’affaire opposant le PMU à des exploitants de sites internet de paris sportifs sur internet, nous offrent l’occasion de revenir sur les éléments caractérisant la fraude en droit des marques d’une part (1), et sur les sanctions d’un dépôt frauduleux de marque, d’autre part (2).

1. Les éléments caractérisant la fraude

a. Les éléments constitutifs de la fraude

La fraude est spécialement visée par le code de la propriété intellectuelle à l’article L.712-6 qui dispose : « Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut en revendiquer sa propriété en justice. A moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l’action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d’enregistrement ».

Alors que la lettre du texte paraît réserver l’action en revendication au titulaire d’un droit (« la personne qui estime avoir un droit »), la jurisprudence n’hésite pas à en faire application alors même que celui qui exerce l’action ne dispose pas strictement d’un droit privatif sur le signe mais en fait usage.

Dans le cadre d’une action fondée sur la fraude, il convient d’établir la connaissance qu’avait ou que devait avoir le déposant de l’usage antérieur du signe ainsi que l’intention de nuire (par exemple, le dépôt effectué en vue d’interdire l’usage du signe) qui, le plus souvent, se confond avec la connaissance de l’usage antérieur du signe.

Sur la base de ce texte, une société d’édition a pu obtenir le transfert de la marque déposée par son ancien gérant à son nom, alors que la société exerçait ses activités sous une dénomination éponyme (CA Paris, 29 oct. 2010, RG n°09/15237) le déposant ne pouvant, en sa qualité de gérant, ignorer qu’il acquérait des droits une expression qui constituait la dénomination de la société exerçant une activité visée dans le dépôt de la marque. De même, la Fédération française de rugby a pu obtenir le transfert de la marque « Equipe de France de rugby » déposée par un tiers alors que l’article L.131-17 du code du sport prévoit que seule les fédérations sportives délégataires peuvent décerner ou faire décerner l’appellation « équipe de France » (Cass.com., 23 nov. 2010, pourvoi n° 09-70716) ; c’est moins l’intention frauduleuse que la violation d’une obligation légale qui est retenue en l’espèce.

A côté de l’action en revendication pour fraude, la victime d’un dépôt frauduleux peut en obtenir la nullité sur la base de la théorie générale de la fraude et de l’adage fraus omnia corrumpit. Cette action en nullité trouve notamment à jouer en cas de détournement du droit des marques.

b. Le cas du détournement de la finalité du droit

Hors le cas visé à l’article L.712-6 du CPI, la fraude peut également être invoquée par tout tiers intéressé au soutien d’une action en nullité de la marque.

Tel était le cas dans l’espèce ayant conduit au jugement du 23 novembre 2010 du TGI de Paris (TGI Paris, 23 nov.2010, RG n°09/09267). Cette affaire opposait des sociétés exploitant des sites internet de paris sportifs en ligne dont notamment des courses hippiques au PMU lequel les avait assigné en contrefaçon en raison de la reproduction sur leur site internet notamment des marques verbales et figuratives « simple », « couplé », « trio », « tiercé », « quarté+ », « quinté+ », « 2sur4 », « multi ».

Les défendeurs opposaient la nullité des marques en raison de leur caractère frauduleux. A cette fin, ils avançaient que les marques avaient été déposées par le PMU dans un contexte d’ouverture à la concurrence des jeux de paris en ligne en vue d’empêcher les opérateurs privés et les nouveaux concurrents d’utiliser les noms règlementaires des paris hippiques.

Le tribunal prononce la nullité des enregistrements des marques du PMU en raison de leur caractère frauduleux après avoir rappelé que la fraude peut être caractérisée dès lors que le dépôt a été effectué pour détourner le droit des marques de sa finalité, c’est-à-dire non pas pour distinguer des produits et services en identifiant leur origine, mais pour vouloir priver des concurrents du déposant ou tous les opérateurs d’un même secteur, d’un signe nécessaire à leur activité.

Selon le tribunal, en déposant à titre de marque les noms de paris nécessaires pour désigner un type de pari déterminé par arrêté ministériel, alors qu’il savait que les paris allaient être ouverts à la concurrence, le PMU a cherché à maintenir le monopole dont il bénéficiait avant l’entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2010, en empêchant les concurrents d’utiliser ce type de dénomination. Selon le tribunal : « le PMU avait pour objectif de gêner tout éventuel concurrent par un obstacle juridique illégitime et a ainsi détourné le droit des marques de sa finalité ».

2. La sanction de la fraude

a. La nullité ou le transfert de la marque déposée frauduleusement

L’action intentée sur le fondement de l’article L.712-6 du CPI est une action en revendication ; elle conduit, si la fraude est reconnue, au transfert de la marque à celui dont les droits ont été méconnus lequel se trouve donc subrogé dans les droits du déposant.

Lorsque la fraude est avancée dans le cadre d’une action en nullité, la reconnaissance de la fraude aboutit à la nullité du dépôt et le signe se retrouve libéré de tout droit privatif. Ainsi, dans l’affaire du PMU, la nullité des marques est prononcée car l’action visait à « libérer » des dénominations nécessaires à tous les opérateurs de paris hippiques et les demandeurs ne disposaient pas de droits antérieurs sur les signes annulés. Cette action en nullité peut également être exercée par celui qui peut se prévaloir de droits antérieurs mais qui privilégie cette voie notamment parce qu’il ne souhaite pas devenir titulaire de la marque contestée.

Les actions diffèrent quant à leurs effets mais se rejoignent en pratique sur le délai de prescription applicable. En effet, l’action en revendication est soumise au délai de prescription de trois ans sauf lorsque le déposant est de mauvaise foi ; or, dans le cadre de la fraude, la mauvaise foi sera quasi nécessairement caractérisée.

b. L’intérêt de la théorie de la fraude en droit des marques

La fraude peut être invoquée soit dans le cadre d’une action en revendication pour récupérer une marque déposée au mépris des droits de celui qui s’estime fraudé, soit dans le cadre d’une action en nullité pour rendre disponible un signe indûment réservé comme marque, permettant ainsi de «supprimer» les marques gênantes.

Ainsi, la personne qui n’aurait pas effectué le dépôt d’une dénomination qu’elle utilise, et qui ne peut faire valoir un droit antérieur, pourra toutefois récupérer ou faire annuler la marque déposée par un tiers qui ne dispose pas de droits sur cette dénomination si elle est en mesure d’établir que ledit tiers à procédé au dépôt en connaissance de l’usage qui en était fait et était animé d’une intention de nuire.

Plus largement, ainsi que le relève le TGI de Paris dans l’affaire du PMU, l’action en nullité de l’enregistrement d’une marque, limitativement ouverte par l’article L 714-3 du CPI, n’exclut pas que cette action puisse être engagée par tout tiers intéressé sur le fondement de ce principe général du droit.

Aussi, en complément des hypothèses de nullité de la marque spécialement envisagées par le code de la propriété intellectuelle lorsqu’une marque ne remplit pas les conditions de validité ou porte atteinte à des droits antérieurs, une action en nullité fondée sur le droit commun de la fraude permettra de « supprimer » les marques gênantes. Les tiers qui ont un intérêt légitime pourront contester les dépôts frauduleux à savoir notamment ceux effectués dans le seul dessein d’empêcher l’usage de la dénomination, alors que cet usage est légitime, sans être dictés par la volonté de faire usage du signe dans sa fonction initiale, celle de distinguer les produits et services d’une entreprise.

La fraude s’avère donc un correctif indispensable, et pour cette raison largement employée, pour contester les dépôts de marque motivés par des considérations étrangères à la vocation de ce signe distinctif.

CORPORATE ET DROIT DES SOCIETES

L’article 1862 du code civil ne confère pas de droit de préemption
(Cass. com., 7 décembre 2010, pourvoi n°09-17.351)

Conformément à l’article 1861 du code civil, l’agrément de tous les associés est obligatoire en cas de cession de parts d’une société civile. L’article 1862 prévoit, quant à lui, que « lorsque plusieurs associés expriment leur volonté d’acquérir, ils sont, sauf clause ou convention contraire, réputés acquéreurs à proportion du nombre de parts qu’ils détenaient antérieurement ».

Certains ont voulu voir dans cet article l’instauration d’un véritable droit de préemption au bénéfice des associés ou de la société en cas de refus d’agréer le cessionnaire pressenti. C’est ce que tentait de soutenir l’une des parties dans cette affaire.

Un des associés projetait de céder ses parts et a donc consenti une promesse de vente à un tiers. Un autre associé lui adresse une proposition de rachat de ses parts.

Une fois l’agrément obtenu, le cédant cède ses parts au tiers en application de ladite promesse. L’associé qui avait proposé le rachat des parts a introduit une action en annulation de la cession des parts qui serait intervenue en violation de son droit de préemption.

Dans un arrêt rendu le 7 décembre 2010, la Cour de cassation énonce clairement que l’article 1862 du Code civil ne confère aux associés du cédant aucun droit de préemption. Il se borne en effet à conférer au cédant la faculté d’obtenir le rachat des parts dont la cession était projetée dans l’hypothèse où il n’aurait pas obtenu l’agrément de la cession envisagée.

En l’espèce, la société ayant agréé la cession des parts au tiers, celle-ci pouvait intervenir valablement, les autres associés ne disposant d’aucun droit de préemption.

Exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées
(Ord. n° 2010-1511, 9 déc. 2010, JO 10 déc. ; Décret 2010-1619 du 23 déc. 2010, JO 26 déc.)

L’ordonnance 2010-1511 du 9 décembre 2010 porte transposition de la directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007 concernant l’exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées. Ce texte modifie la partie législative du code de commerce.

L’article L.225-105 est complété pour permettre aux actionnaires d’inscrire des points à l’ordre du jour de l’assemblée sans déposer simultanément de projet de résolution.

L’article L.225.106, I est modifié afin de permettre, dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché règlementé ou sur un système multilatéral, la représentation par toute personne physique ou morale de son choix. Par ailleurs, l’actionnaire peut, en toute hypothèse, se faire représenter par un autre actionnaire, par son conjoint, mais également par son partenaire avec lequel il a conclu un pacte civil de solidarité.

Il est également précisé que le mandat doit être écrit et communiqué à la société (article L.225-106, II).

Un nouvel article L.225.106, 1 est introduit afin d’instituer l’obligation pour le mandataire d’informer l’actionnaire de tous faits permettant à ce dernier de mesurer le risque que le premier poursuive un intérêt autre que celui du mandat. L’article L.225.106, 2 encadre les pratiques de sollicitation active de mandats. Enfin, l’article L.225-108 est complété afin de préciser qu’une réponse commune peut être apportée aux questions écrites dès lors qu’elles présentent le même contenu et « qu’elle figure sur le site internet de la société dans une rubrique consacrée aux questions posées ».

Le décret 2010-1619 du 23 décembre 2010 modifie, quant à lui, la partie règlementaire du Code de commerce. L’ensemble de ces dispositions est applicable au 1er janvier 2011.

DROIT FISCAL

Durcissement de la doctrine : Loi Tepa
(Instruction 7 S-7-10 du 15 novembre 2010)

La Loi TEPA du 21 août 2007 a mis en place une réduction d’Impôt de Solidarité sur la Fortune en faveur de l’investissement dans les petites et moyennes entreprises au sens communautaire.

La présente instruction commente le mécanisme mis en œuvre et apporte des précisions sur l’articulation entre la réduction d’ISF et la réduction d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement au capital des petites et moyennes entreprises.

En cas de souscription de parts de fonds d’investissement ou de titres de sociétés holdings, la fraction du versement non prise en compte pour le calcul de la réduction d’ISF ne peut plus bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu. Les précisions contraires relatives aux fonds, qui figurent dans l’instruction du 11 avril 2008 n°7 S-3-08, sont rapportées, pour les versements effectués à compter du lendemain de la date limite de dépôt de la déclaration d’ISF au titre de 2010, soit en pratique pour la majorité des redevables aux versements effectués à compter du 16 juin 2010.

Aides intragroupe : distinction entre les aides commerciales et celles à but financier
(Conseil d’Etat, 27 octobre 2010, n°325281)

Le régime fiscal applicable aux aides consenties entre sociétés est différent selon que leur octroi répond à une finalité commerciale ou financière. Dans le cadre des relations entre une société mère et sa filiale, il est fréquent que les deux motivations soient imbriquées. Dans cette situation, la distinction entre les abandons de créances à caractère commercial et ceux qui répondent à des motivations financières est opérée en recherchant quels sont les motifs prépondérants qui ont conduit à l’octroi de l’abandon. Ainsi, le caractère commercial d’une aide est reconnu lorsque l’aide s’inscrit dans l’objectif du maintien des activités de la société mère.

Le Conseil d’Etat vient de préciser que « présente un caractère financier l’abandon de créance consenti par une société à sa filiale lorsque le contrat commercial qui lie les deux sociétés ne représente pas un poids important dans l’activité de la société mère et que celle-ci ne peut justifier que le non-recouvrement de sa créance aurait des conséquences sur la poursuite de ses propres activités ».

La Haute Assemblée s’attache particulièrement au poids que représente la filiale dans l’activité globale déployée par sa mère pour déterminer si un abandon peut être considéré comme ayant une finalité commerciale ou non.

Correction symétrique des bilans : les dispositions rétroactives de la loi de 2004 sont invalidées
(Conseil constitutionnel, 10 décembre 2010 n° 2010-78 QPC , JO 11 décembre 2010 p. 21712)

L'article 43 de la loi du 30 décembre 2004 a rétabli pour les exercices clos à compter du 1er janvier 2005 et aux impositions établies à compter de cette date le principe d'intangibilité du bilan d’ouverture. Toutefois, le 4ème paragraphe de cet article a validé les impositions établies avant cette date, ainsi que les décisions prises sur les réclamations, en tant qu'elles seraient contestées sur ce point par le contribuable. Selon les termes de cet article le législateur a réservé à l'État la faculté de se prévaloir, pour les impositions établies avant le 1er janvier 2005, de la jurisprudence précitée privant à titre rétroactif le seul contribuable du bénéfice des dispositions antérieures. Le Conseil Constitutionnel vient de déclarer inconstitutionnelles les dispositions de ladite loi. Cette décision prend effet à compter de sa publication, soit le 11 décembre. Elle peut être invoquée dans les instances en cours à cette date mais surtout permettre d’introduire des réclamations pour des rehaussements qui ont été notifiés sur les bases de l’article déclaré inconstitutionnel, la décision rouvrant le délai de réclamation.

ENTREPRISES EN DIFFICULTE

Avance de trésorerie et actif disponible
(Cass. com., 16 novembre 2010, pourvoi n°09-71.278)

Par cet arrêt rendu le 16 novembre 2010, la chambre commerciale de la Cour de cassation fait application, pour la première fois, par une décision de censure, de la définition de la cessation des paiements remaniée par l'ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008. Par cette décision, la Cour considère, au visa de l'article L.631-1 alinéa 1er du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, telle que modifiée par l'ordonnance du 18 décembre 2008, qu'une avance de trésorerie qui n'est pas bloquée ou dont le remboursement n'a pas été demandé, constitue un actif disponible. Cette décision, si elle constitue la première application de l’article L.631-1 modifié, s’inscrit cependant dans la lignée de la jurisprudence de la Cour de cassation.

En effet, par un arrêt rendu le 12 mai 2009 au visa de l’article L.621-1 du code de commerce, la chambre commerciale avait précisé qu’une avance en compte courant, qui n'est pas bloquée ou dont le remboursement n'a pas été demandé, constitue un actif disponible. La solution est reprise s’agissant d’une avance de trésorerie, qui doit donc être considérée comme un actif disponible à partir du moment où aucun évènement entraînant son exigibilité (demande de remboursement anticipé, survenance du terme) n’est intervenu. Cette solution doit être approuvée, l’avance de trésorerie non exigible constituant une « réserve de crédit permettant au débiteur de faire face à son passif exigible » au sens de l’article L.631-1 modifié du code de commerce.

Liquidation judiciaire : forclusion du créancier établi à l’étranger
(Cass. com., 16 novembre 2010, pourvoi n°09-16.572)

Dans cet arrêt, rendu en application du règlement 1346-2000 sur les procédures d’insolvabilité et de l’article L. 622-26, alinéa 3, du code de commerce, la Cour de cassation rappelle que la publication du jugement d’ouverture dans un autre Etat membre intervient soit sur l’initiative du syndic de la procédure, soit, dans l’hypothèse où le débiteur a un établissement dans cet autre Etat membre, sur décision de cet Etat. Hors ces hypothèses, c’est le droit commun de l’Etat d’ouverture qui trouve à s’appliquer pour définir les modalités et délais de déclaration des créances, en l’espèce l’article L.622-26 du code de commerce.

Dès lors, l’absence de publication du jugement d’ouverture en Allemagne, siège du créancier, ne permettait pas de faire échec aux délais de déclaration de créance et de relevé de forclusion, qui courraient à compter de la publication du jugement au BODACC. De même, la dissimulation alléguée de la créance par le débiteur, si elle pouvait le cas échéant justifier un relevé de forclusion, ne permettait pas de porter à un an le délai d’action en relevé de forclusion, réservé aux créanciers dans l’impossibilité de connaître l’existence de leur créance avant l’expiration du délai de six mois, s’agissant en l’espèce d’un cocontractant du débiteur.

Portée du jugement de clôture pour extinction du passif
(Cass. com., 16 novembre 2010, pourvoi n°09-69.495)

Par son arrêt du 16 novembre 2010, la Cour de cassation vient réaffirmer la possibilité pour un créancier de saisir le juge de droit commun afin qu’il soit statué sur sa créance, dans l’hypothèse où il n’aurait pas été désintéressé, alors que le redressement judiciaire de son débiteur s’est terminé par une clôture pour extinction du passif (cette possibilité de clôture pour extinction du passif étant, depuis la loi de sauvegarde, prévue par l’article L.631-16 du code de commerce).

La chambre commerciale apporte dans son arrêt une précision logique quant à la charge de la preuve : c'est au créancier prétendant n'avoir pas été désintéressé qu'il appartient d'établir ce fait, et non, comme le soutenait le pourvoi rejeté, au débiteur de prouver qu'il a apuré la totalité de son passif. En d’autres termes, le jugement de clôture pour extinction du passif vaut, à tout le moins, présomption simple de règlement par anticipation de toutes les créances inscrites au plan.

CONTRATS COMMERCIAUX

Droit à commission de l’agent immobilier et promesse synallagmatique de vente
(Cass. civ. 1ère, 13 décembre 2010, pourvoi n° 09-71.205)

L’article 6 de la loi Hoguet du 2 janvier 1970 subordonne le droit à rémunération ou à commission de l’agent immobilier par l’intermédiaire duquel l’opération a été conclue à la condition que l’opération «ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l’engagement des parties».

En l’espèce, une promesse synallagmatique de vente avait été conclue sous seing privé, par l’entremise d’un agent immobilier, et prévoyait la réitération par acte authentique sous un certain délai. Le bénéficiaire ayant fait savoir au notaire qu’il n’entendait pas signer l’acte authentique, il a été assigné par l’agent immobilier en paiement de la commission convenue. Condamné en appel, il soutenait dans son pourvoi que « aucune commission ni somme d’argent quelconque ne peut être exigée ou même acceptée par l’agent immobilier, ayant concouru à une opération qui n’est pas effectivement conclue et constatée dans un acte authentique contenant l’engagement des parties ».

Il fut débouté par la Cour de cassation qui commence par affirmer que « l’acte écrit contenant l’engagement des parties, auquel l’article 6 de la loi du 2 janvier 1970 subordonne le droit à rémunération ou à commission de l’agent immobilier par l’intermédiaire duquel l’opération a été conclue, n’est pas nécessairement un acte authentique ». Puis, relevant que la cour d’appel avait constaté qu’il résultait de la promesse synallagmatique de vente que les parties n’avaient pas entendu faire de la signature de l’acte authentique une condition de la vente mais l’avaient considérée comme une simple formalité destinée à en retarder les effets, elle l’approuve d’avoir retenu que la vente devait être regardée comme effectivement conclue. La solution est conforme aux principes juridiques. La promesse de vente vaut vente et la vente est formée dès qu’il y a accord sur le prix à moins, par exemple, que les parties aient entendu faire de la réitération par acte authentique une condition de formation de la vente : de consensuelle, la vente devient solennelle. Or, tel n’était pas en l’espèce.

La Cour de cassation rappelle que l’action de in rem verso a un caractère subsidiaire
(Cass. civ. 1ère, 9 décembre 2010, pourvoi n°09-16.795)

L’action de in rem verso, d’origine prétorienne, n’est admise que dans les cas où le patrimoine d’une personne se trouve, sans cause légitime, enrichi au détriment d’une autre et que l’appauvri ne jouit, pour obtenir ce qui lui est dû, d’aucune autre action. Cette action présente donc un caractère subsidiaire et elle ne peut être intentée, notamment, pour suppléer à une autre action que le demandeur ne peut intenter par suite d’un obstacle de droit.

Ce principe vient d’être rappelé par la Cour de cassation. Dans l’affaire commentée, une femme avait assigné les héritiers de son ex-concubin en paiement d’une certaine somme correspondant à différentes avances de fonds qu’elle lui avait consenties. Constatant qu’elle invoquait l’existence d’un prêt et qu’elle ne rapportait pas la preuve d’une obligation de remboursement par son ex-concubin, sa demande fût rejetée.

Le devoir de conseil du banquier en matière d’assurance de groupe
(Cass. com., 14 décembre 2010, pourvoi n° 08-20.820)

Le présent arrêt rappelle une solution constante selon laquelle le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d’adhérer au contrat d’assurance de groupe, est tenu de l’éclairer sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation, et ajoute que « la connaissance par le client des stipulations du contrat d’assurance de groupe auquel il a adhéré, fussent-elles claires et précises, ne dispense pas le banquier de son obligation».

CONCURRENCE ET DISTRIBUTION

Adoption des règlements d’exemption relatifs aux accords entre concurrents
(Règlements d'exemption n°1217/2010 et n°1218/2010 du 14 décembre 2010)

Après la révision des règles relatives aux restrictions verticales en début d’année 2010, la Commission européenne a adopté le 14 décembre dernier deux règlements d’exemption applicables aux restrictions horizontales, c’est-à-dire aux accords entre entreprises concurrentes, qui remplaceront la législation communautaire actuelle à compter du 1er janvier 2011, jusqu’au 31 décembre 2022.

Le premier règlement (n°1217/2010) concerne les accords de recherche et développement (R&D) et remplace ainsi le règlement n°2659/2000 du 29 novembre 2000 qui leur était consacré. Il étant notamment son champ d’application aux accords par lesquels une partie se limite à financer les activités de R&D de l’autre partie.

Le deuxième (n°1218/2010) porte quant à lui sur les accords de spécialisation, et remplace l’ancien règlement n°2658/2000.

Outre un document répondant aux questions les plus fréquentes publié le jour de l’adoption des règlements, la Commission a également adopté de nouvelles lignes directrices qui, loin d’être uniquement destinées à expliciter et compléter les nouveaux règlements, ont pour objectif plus large de définir comment des concurrents peuvent coopérer sans enfreindre les règles de concurrence de l’Union européenne.

Deux principaux éléments sont à retenir de ces lignes directrices. D’une part, les développements relatifs à la normalisation, qui fournissent notamment des informations sur la validité des processus de sélection des normes industrielles au regard du droit de la concurrence. D’autre part, ceux relatifs à l’évaluation de la compatibilité des échanges d’informations avec le droit de la concurrence, sujet particulièrement sensible s’agissant d’accords entre concurrents, ces derniers pouvant en effet favoriser des alignements de prix.

Caractère suffisant de l’état général du marché
(CA Douai, 25 novembre 2010, R.G. n°09/03671)

L’arrêt commenté est une illustration supplémentaire du caractère limité de l’information exigée du franchiseur quant au marché, au sein de l’information précontractuelle du candidat franchisé. Dans l’espèce, qui concernait un réseau d’agences matrimoniales, le franchisé prétendait notamment que la présentation du marché national était trop succincte pour lui permettre de se faire une opinion.

La cour d’appel constate, s’agissant du marché général, que le DIP faisait état de la population âgée de plus de 18 ans, de celle des personnes libres et de celle vivant seules. Selon la cour, ces informations sont « satisfactoires au regard de l’activité envisagée ». Elle rappelle également que le seul fait que le franchisé n’ait pas atteint les prévisions ne prouve pas leur caractère trompeur.

Preuve de la date de la remise de l’information précontractuelle
(CA Caen, 2 décembre 2010, RG n°09/01880)

On le sait, l’information précontractuelle doit être délivrée au candidat franchisé 20 jours avant la signature du contrat de franchise ou, le cas échéant, du versement d’une somme de manière anticipée. Des difficultés peuvent surgir quant à la preuve de la date de la remise du DIP, comme l’illustre l’arrêt commenté. En l’espèce, le franchisé soutenait que le DIP ne lui avait été remis que le jour où il avait signé un protocole préalable au contrat de franchise et payé un acompte au franchiseur. La cour a écarté cet argument en relevant un faisceau d’indices allant à son encontre puis en constatant que le franchisé ne prouvait pas avoir reçu le DIP moins de 20 jours avant la signature du protocole.

SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES

Licenciement pour motif économique au sein d’une UES
(Cass. soc., 16 novembre 2010, pourvois n°09-69.485 et n°09-40.555)

La Cour de Cassation s’est prononcée sur deux questions relatives au licenciement économique intervenant au sein d’entreprises appartenant à une UES.

Dans le premier arrêt, un salarié reprochait à son employeur de ne pas avoir mis en place un PSE alors que l’entreprise, de moins de 50 salariés mais appartenant à une UES, avait procédé au licenciement d’au moins 10 salariés sur 30 jours. La chambre sociale a estimé que « si les conditions d’effectifs et le nombre de licenciements dont dépend l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi s’apprécient au niveau de l’entreprise que dirige l’employeur, il en va autrement lorsque, dans le cadre d’une unité économique et sociale, la décision de licencier a été prise au niveau de l’UES ».

Dans le second arrêt, une salariée qui avait fait l’objet d’un licenciement pour motif économique reprochait à son employeur de ne pas avoir étendu l’obligation de reclassement et la priorité de réembauche à l’ensemble des sociétés des groupes qui constituait, selon elle, une UES. La Haute juridiction a estimé que la salariée était dépourvue de qualité à agir en considérant que « la reconnaissance judiciaire d’une UES ne peut être demandée par une personne étrangère à la collectivité de travail dont il s’agit d’assurer la représentation ».

Point de départ du délai de convocation à un entretien préalable en cas de report de celui-ci
(Cass. soc., 24 novembre 2010, pourvoi n°09-66.616)

La convocation à un entretien préalable de licenciement doit être présentée au salarié dans un délai de 5 jours ouvrables dudit entretien (article L.1232-2 du code du travail), sous peine d’ouvrir droit à des dommages et intérêts en faveur du salarié pour irrégularité de procédure. Dans cette affaire, un salarié qui avait régulièrement été convoqué à un entretien préalable, avait sollicité le report de celui-ci et reçu une seconde convocation en conséquence qui, contrairement à la première, ne respectait pas le délai légal. La Cour de cassation, interrogée sur le point de départ du délai à prendre en compte, a estimé que lorsque l’entretien préalable est reporté à la demande du salarié, le délai légal de 5 jours court à compter de la convocation initiale.

Lutte contre le travail dissimulé
(Loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, n°2010-1594, JO 21/12/2010)

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 est parue au Journal officiel du 21 décembre 2010 après avoir été, pour l’essentiel, déclarée conforme par le Conseil constitutionnel.

La loi prévoit notamment un article 40 qui complète l’article L.8221-5 du code du travail relatif au travail dissimulé. Ainsi, l’employeur devra effectuer une déclaration annuelle des données sociales (DADS) pour chacun des salariés puisque celle-ci permet de s’assurer que les cotisations et contributions de sécurité sociale ont bien été déclarées dans leur totalité et payées. Par ailleurs, l’employeur qui conclut un contrat d’au moins 3000 euros avec un sous-traitant, aura l’obligation de s’assurer que ce dernier respecte les formalités imposées contre le travail illégal ; à défaut, le donneur d’ordre pourra être solidaire du paiement des impôts, taxes et cotisations avec le sous-traitant indélicat. Le donneur d’ordre devra ainsi se faire remettre les attestations URSSAF ainsi que d’autres attestations permettant de vérifier que son sous-traitant a déclaré et respecté ses cotisations et contributions de sécurité sociale.

IMMOBILIER

Nullité d’une clause résolutoire mentionnant un délai erroné
(Cass. civ. 3ème, 8 décembre 2010, pourvoi n°09-16.939)

Une clause résolutoire mentionnant un délai de mise en œuvre inférieur à un mois après un commandement resté infructueux est nulle. C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation. En l’espèce, la clause résolutoire insérée au bail prévoyait sa mise en œuvre 15 jours après un commandement resté infructueux. La sanction est sans appel et il était vain pour le bailleur de tenter de sauver sa clause en arguant que le commandement qui avait été délivré mentionnait le délai d’un mois, et qu’en conséquence, la clause pouvait produire ses effets.

La Cour de cassation rejette l’argumentation, estimant que les dispositions de l’article L.145-41 du code de commerce qui sont d’ordre public, avaient été méconnues.

Reste que si le bailleur souhaite résilier un bail en cas de manquement par le locataire de ses obligations, il devra alors saisir le juge du fond sur le fondement de l’article 1184 du code civil, le commandement visant la clause résolutoire, bien que ne pouvant entrainer la résolution du contrat de bail, aura tout de même les effets d’une mise en demeure.

Privilège du bailleur contre clause de réserve de propriété : primauté est donnée au bailleur
(Cass. civ. 3ème, 16 novembre 2010, pourvoi n°09-70.765)

Dans le cadre d’une instance opposant un bailleur et un créancier revendiquant une clause de réserve de propriété sur le stock du locataire sur lequel une clause de réserve de propriété avait été stipulée, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler que le privilège du bailleur primait celui du propriétaire revendiquant.

En l’espèce, un locataire défaillant s’était vu condamner, par ordonnance de référé, à régler à son bailleur une provision correspondant à son arriéré locatif. En vertu de ce titre, le bailleur saisissait l’ensemble du stock, à savoir des bouteilles de vin, sur lesquelles une clause de réserve de propriété avait été stipulée. Le créancier assignait alors le bailleur en distraction des marchandises saisies.

Les juges du fond ont ordonné la restitution au créancier des marchandises entreposées dans les lieux loués, au motif que ce dernier ne revendiquait pas un privilège mais son titre de propriété qui était établi et que le privilège ne s’exerçait que sur le patrimoine du débiteur dans lequel les bouteilles n’y étaient pas rentrées compte tenu de la clause de réserve de propriété. La Cour de cassation censure les juges du fond, estimant que « le privilège du bailleur d’immeuble porte sur tous les meubles garnissant le local loué, même s’ils appartiennent à un tiers, sauf s’il est établi que le bailleur connaissait l’origine de ces meubles lorsqu’ils ont été introduits dans ce local ». La décision ne peut être qu’approuvée, la solution contraire reviendrait à priver d’effet le privilège du bailleur.

Condition d’exigibilité du paiement des charges dans le cadre d’un bail d’habitation
(Cass. civ. 3ème, 8 décembre 2010, pourvoi n°09-71.124)

A l’occasion d’un litige relatif à des charges impayées dans le cadre d’un bail d’habitation, la Cour de cassation a eu à rappeler les conditions d’exigibilité des charges, telles que prévues à l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989. En l’espèce, une locataire avait été condamnée au paiement d’un arriéré de charges, les juges du fond ayant estimé que cette dernière n’avait jamais contesté ni le montant des charges appelées, ni le décompte annuel des charges locatives qui lui avait été adressée, par le Bailleur.

La Cour de cassation censure, estimant que les conditions d’exigibilité des charges prévues à l’article 23 précité qui énonce que les charges font l’objet d’une régularisation annuelle et qu’avant régularisation, le bailleur communique un mois avant au locataire le décompte par nature de charges et le mode de répartition entre les locataires, et tient durant un mois à compter de l’envoi de ce décompte, à disposition des locataires, les pièces justificatives, ne sont pas caractérisées en l’espèce.

PROPRIETE INTELLECTUELLE

Contrefaçon et compétence du Tribunal de commerce
(Cass. com., 23 novembre 2010 : pourvoi n° 09-70859)

Le contentieux de la contrefaçon est réservé à certains magistrats spécialisés. Ainsi, la loi du 29 octobre 2007 a donné compétence exclusive aux TGI pour traiter du contentieux de la contrefaçon, mais il aura fallu attendre le décret du 9 octobre 2009 pour que les TGI compétents soient expressément désignés. Pour autant, comme l’illustre l’arrêt commenté, le tribunal de commerce n’est pas totalement incompétent lorsque le contentieux a trait au droit des marques ou au droit d’auteur.

Dans cette affaire, le contentieux concernait la résiliation d’un contrat de licence de marque et de droit d’auteur. Cette résiliation était contestée par le licencié qui avait saisi le tribunal de commerce à cette fin. Le concédant avait alors soulevé une exception d’incompétence du tribunal de commerce aux motifs que l’article L.716-3 du code de la propriété intellectuelle, en matière de marque, et l’article L.331-1 du même code en matière de droit d’auteur, donnent compétence exclusive aux TGI pour ces questions.

La cour d’appel avait retenu l’exception d’incompétence aux motifs que la compétence du TGI doit être retenue même lorsque n’est invoquée qu’une responsabilité contractuelle de droit commun. Or, la Cour de cassation casse l’arrêt considérant qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si les prétentions de la demanderesse portaient sur l’application de dispositions relevant du droit des marques ou du droit d’auteur, la cour a privé sa décision de base légale.

Cette décision confirme que les tribunaux de commerce peuvent être amenés à se prononcer dans des affaires qui ont trait à la propriété intellectuelle. En effet, afin de déterminer si le litige relève ou non de la compétence exclusive du TGI, il convient de se référer aux demandes formulées, peu important que le contrat ait pour objet une marque ou un droit d’auteur. Le litige ne relève de la compétence exclusive que s’il suppose une connaissance ou une mise en œuvre des règles de propriété intellectuelle.

Exploitation d’une œuvre et présomption de titularité des droits d’auteur
(Cass. civ. 1ère, 15 novembre 2010, pourvoi n°09-66.160)

Le principe simple selon lequel l’auteur d’une œuvre de l’esprit est titulaire des droits sur celle-ci connaît un aménagement lorsqu’il s’agit d’une œuvre collective : en effet, aux termes de l’article L.113-5 du code de la propriété intellectuelle : « L’oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. Cette personne est investie des droits de l’auteur ».

Cette disposition a servi de base à la jurisprudence pour dégager une présomption plus générale, peu important que l’oeuvre soit collective ou non, permettant de lutter plus efficacement contre la contrefaçon. Elle est reprise par la Cour de cassation dans l’arrêt commenté, rendu au visa de l’article L.113-5 du CPI, en ces termes : « En l’absence de revendication du ou des auteurs, l’exploitation de l’oeuvre par une personne physique ou morale sous son nom, fait présumer, à l’égard du tiers recherché pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l’oeuvre du droit de propriété incorporelle d’auteur ».

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, une société exploitant du mobilier médical, agissait en contrefaçon à l’encontre d’une autre société à qui elle reprochait de commercialiser des meubles reprenant les caractéristiques des siens. Une personne physique, se prévalant de sa qualité d’auteur, était intervenue à l’instance. La cour d’appel avait donc écarté le jeu de la présomption de l’article L.113-5 du CPI, au motif qu’une personne se prévalait de la qualité d’auteur.

Mais la Cour de cassation casse l’arrêt reprochant aux juges du second degré de n’avoir pas recherché si la personne physique qui formulait cette revendication était bien l’auteur des œuvres litigieuses.

Il ne suffit pas qu’un tiers revendique être l’auteur de l’oeuvre pour que la présomption de titularité des droits au bénéfice de la personne morale qui l’exploite soit détruite, encore faut-il que ce dernier soit l’auteur de l’oeuvre ce qu’il doit prouver ; c’est ce que rappelle la Cour de cassation.

DROIT MEDICAL

Insuffisance de contrôle judiciaire et procédure d’hospitalisation à la demande d’un tiers
(Conseil Constitutionnel, QPC du 26 novembre 2010, n°2010-71)

Le Conseil Constitutionnel a été saisie d’une question prioritaire de constitutionnalité relative, d’une part, aux conditions de l’hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT) et, d’autre part, à l’insuffisance des droits des personnes hospitalisées sans leur consentement (HDT ou HO). Certes le Conseil Constitutionnel a validé les dispositions relatives aux conditions d’admission des malades dans le cadre d’une HDT. En revanche, les dispositions relatives au maintien de l’HDT ont été déclarées inconstitutionnelles, en raison d’un déficit de contrôle judiciaire. En effet, en l’état actuel de la législation, l’alinéa 1er et 2 de l’article L 3212-7 du Code de la Santé Publique dispose que « dans les trois jours précédant l'expiration des quinze premiers jours de l'hospitalisation, le malade est examiné par un psychiatre de l'établissement d'accueil.
Ce dernier établit un certificat médical circonstancié […] au vu de ce certificat, l'hospitalisation peut être maintenue pour une durée maximale d'un mois
». Au-delà de cette durée, l’hospitalisation peut être renouvelée pour des périodes maximales d’un mois.

Ainsi, le Conseil a estimé que les exigences découlant de l’article 66 de la Constitution française qui spécifie que « nul ne peut être arbitrairement détenu » ne peuvent être sauvegardées « que si le juge intervient dans le plus court délai possible ». E

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