Marjane

 Un entretien avec Alain Baron, directeur du développement de Marjane

Siège de la marque Marjane

Yves SASSI : Pouvez-vous nous faire un rapide historique de Marjane au Maroc ?

Alain Baron : Ce qui est exemplaire dans l'histoire de Marjane, c'est que c'est un indépendant, Monsieur Bahraoui, qui a créé l'entreprise en 1990. De plus, il a eu l'idée d'installer une boulangerie traditionnelle, à l'intérieur de son hypermarché.

A cette époque, il a pris des conseils techniques auprès de Prisunic, et s'est également entouré d'un architecte, spécialisé dans l'aménagement de grandes surfaces.

En 1992, l'Ona a pris conscience de l'importance stratégique de la distribution moderne et a racheté 100 % du capital de l'entreprise.

En 93 un deuxième établissement a été créé en s'appuyant essentiellement sur l'expérience du premier magasin. Mais les dirigeants de l'Ona se sont rendus compte qu'ils ne pouvaient réinventer la grande distribution. Ils se sont rapprochés du groupe Promodes en Août 94.

Il était prévu dans les accords un apport de compétence en ingénierie et en marchandise. A l'époque nous avons du vérifier que le concept fonctionnait et pouvait être rentable. Nous avons fait des projections et après une période d'observation, nous avons mis en chantier le troisième magasin à Marrakech qui a ouvert ses portes en 1999. D'autres implantations ont suivi, à Rabat, Ryad, puis Agadir et Tanger et un second à Casablanca, en 2001. Enfin Fes (2002), Mohammedia Tetouan en 2003, et nous venons de lancer le chantier de Mekhnès qui ouvrira en novembre 2005.

Pour être complet, il faut rappeler qu'en 1998 le groupe Promodes a fusionné avec Carrefour et à l'époque les dirigeants du nouveau groupe ont souhaité retarder les accords passés avec notre groupe. Nous nous sommes donc rapprochés du groupe Auchan avec lesquels nous avons signé un partenariat en janvier 2000. Aujourd'hui Auchan possède 49 % du capital de notre groupe.

Yves SASSI : Le problème foncier est réel au Maroc. Quelle est votre analyse sur ce point ?

Alain Baron : C'est effectivement un problème… au sens large. Le foncier est une valeur refuge et également un outil spéculatif. Il faut savoir que le taux d'urbanisation est énorme, ceci en raison d'une croissance démographique importante. La population a plus que doublé en 20 ans. Cette démographie s'accompagne d'un exode rural. Tout ceci a engendré une spéculation foncière qui complique fortement la modernisation du commerce.

Les autorités ont pris conscience que les périmètres urbains s'élargissaient et ont donc pris des mesures pour le réglementer. Ce qui a également favorisé la spéculation. Dans des villes comme Casablanca ou Rabat, il n'y a plus aucun terrain.

La difficulté est donc de trouver des espaces et les schémas directeurs n'ont en général rien prévu pour le développement du commerce, alors que les zones d'habitation ne cessent de grandir.
Ceci dit, nous travaillons avec les autorités compétentes et nous avons deux grands projets dans Casablanca sur des terrains qui n'étaient pas destinés au commerce, l'objectif étant de créer des activités dans des quartiers à forte densité de population.

Yves SASSI : Quels sont les objectifs de développement de votre groupe ?

Alain Baron : A l'horizon 2007, nous disposerons d'un parc de 16 centres commerciaux. Mais la structure du marché nous a conduit à modifier certaines orientations stratégiques, en nous rapprochant des zones à pouvoir d'achat modeste. Il est clair que le taux de motorisation est encore faible, ce qui est un handicap pour la création d'hypermarchés qui doivent être créés en périphérie.

La clientèle des hypermarchés est à ce jour plus centrée sur les catégories socioprofessionnelles AB et C+. Nous nous tournons résolument vers les catégories C et D et par conséquent nous avons du revoir un certain nombre de critères d'implantation comme les surfaces et les coûts. L'assortiment est également reconsidéré et c'est pour cela que nous développons l'enseigne Acima, plus proche des consommateurs que nous ciblons désormais.