Dossiers de la franchise

Projet de loi Macron : vers un droit spécial des contrats de distribution

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Le projet de Loi Macron (n°  2447) a vocation à « assurer la confiance, à simplifier les règles qui entravent l’activité économique et à renforcer les capacités de créer, d’innover et de produire ».

​Dans la version initiale du projet, deux articles concernaient les contrats de distribution ; ceux-ci ont été complétés par l’amendement n°1681, adopté par l’Assemblée nationale le 30 janvier 2015. Son objectif est de « fluidifier l’activité de commerce, quel qu’il soit, pas seulement alimentaire, pour permettre un changement de réseau ou la prise d’autonomie car la notion d’indépendance dans ce domaine peut appeler certaines nuances. […] Cet amendement vise […] à assouplir les conditions dans lesquelles on peut changer de réseau ou devenir indépendant, au bout d’un délai raisonnable ».

Hautement critiquées, et à plusieurs égards critiquables, les mesures issues de l’actuel projet de loi Macron se résument ainsi :

- les contrats relevant du champ d’application du texte sont réunis dans un ensemble indivisible faisant l’objet d’une échéance unique
- leur durée ne peut excéder 9 ans,
- et sont insusceptibles de renouvellement par tacite reconduction,
- enfin, ils ne peuvent comporter des clauses de non-concurrence post-contractuelle.

Le texte prévoit en effet que « l'ensemble des contrats conclus entre, d'une part, une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des commerçants, autre que celles mentionnées aux chapitres V et VI du titre II du livre Ier du présent code, ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l'article L. 330-3 et, d'autre part, toute personne exploitant pour son compte ou pour le compte d'un tiers au moins un magasin de commerce de détail, ayant pour but commun l'exploitation d'un de ces magasins et comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d'exercice par cet exploitant de son activité de commerçant, prennent fin à la même date, par l'échéance ou par la résiliation d'un des contrats ». Le législateur adjoint à ces contrats une indivisibilité légale de sorte que la résiliation de l’un entraîne la résiliation des autres.

Le texte précise par ailleurs que ces contrats ne peuvent être conclus pour une durée supérieure à 9 ans, c’est-à-dire que leur durée doit être inférieure ou égale à 9 ans. La durée maximale des contrats avait initialement été fixée à 6 ans dans l’amendement déposé par M. Bottes. Un sous-amendement, adopté par les parlementaires a, par la suite, ramené cette durée à 9 ans. Interrogé sur les raisons qui l’ont conduit à choisir ce chiffre, M. Bottes explique avoir retenu, « suite à une réflexion menée depuis longtemps par l’Autorité de la concurrence », un « délai raisonnable ».

Le projet de loi interdit également le renouvellement par tacite reconduction. A nouveau, le législateur s’assure qu’à échéance fixe le partenaire aura la possibilité de remettre en cause son engagement vis-à-vis du réseau.

Le texte ajoute encore qu’est réputée non écrite toute clause qui a pour effet, après l’échéance ou la résiliation d’un des contrats visés par le texte, de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant. La formule vise les diverses clauses de non concurrence et ses dérivés dont les clauses de non-réaffiliation. La stipulation de clause de non-concurrence post-contractuelle, de clauses de non-réaffiliation et autres clauses visant le même objectif, en cas de sortie d’un franchisé du réseau, est d’importance primordial dans les contrats de franchise. Ces clauses ont pour objet de protéger le savoir-faire développé par le franchiseur. Les conditions essentielles de la franchise sont en effet, au-delà de l’enseigne, l’existence et la transmission d’un savoir-faire substantiel. Sans ces clauses, le franchiseur est empêché de protéger à l’issue d’un contrat, d’une part, le résultat de son innovation commerciale et, d’autre part, les membres de son réseau, puisqu’un ancien membre franchisé pourrait ainsi facilement concurrencer les franchisés du réseau qu’il quitte et mettre ce savoir-faire acquis au profit d’un réseau concurrent. Interdire au franchiseur d’intégrer ces clauses dans les contrats de franchise conduit fatalement à une remise en cause du fondement même de la franchise. En revanche, le texte ne fait pas de référence explicite aux clauses de préférence ou de préemption, sauf à les considérer comme de telles limitations à l'exercice de l'activité commerciale. Une telle interprétation n’est pas exclue.


 

Constance PIERRE
Juriste
Simon Associés
Département Distribution, Concurrence, Consommation

 

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