Dossiers de la franchise

La Lettre du Cabinet Novembre 2009

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Editorial

Le rôle de la jurisprudence, dont on a coutume de dire qu’elle est créatrice de droit, est essentiel. L’actualité juridique de ce mois en témoigne, notamment en matière de droit des sociétés, droit social et droit immobilier.

En droit des sociétés, la Cour de cassation vient de rendre un arrêt inédit en déclarant illicite les clauses prévoyant la caducité du droit d’option en cas de licenciement pour faute grave. La portée de cette solution reste incertaine et suscite l’inquiétude : les clauses de présence dans les règlements de plan d’option, fréquentes et licites jusqu’à présent, sont-elles désormais menacées ?

L’actualité du droit du social a été particulièrement active, notamment dans le domaine, pour le moins sensible, de la rupture du contrat de travail ; ainsi, est-il jugé que la proposition de reclassement intervenant avant la seconde visite médicale rend le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement sans cause réelle et sérieuse ; concernant la prise d’acte de rupture du contrat de travail par le salarié, il est jugé que ce dernier ne peut la rétracter.

Quant au droit immobilier, il est le siège de plusieurs décisions de principe intéressant le statut du sous-locataire commercial dont le caractère précaire est confirmé, la mise en œuvre de la garantie des constructeurs en cas de sous-traitance et les effets de l’insuffisance de motivation d’un congé avec refus de renouvellement pour motifs graves et légitimes.

En ce qui concerne notre actualité, le Cabinet vient de publier aux Petites Affiches, pour la quatrième année consécutive, un numéro spécial consacré à la synthèse et à l’analyse de la jurisprudence rendue dans le domaine de la franchise.

Bonne lecture.

LIBRE PROPOS

Le droit au renouvellement en matière de sous location commerciale
(Cass. civ. 3ème, 28 octobre 2009, pourvoi n°08-18.736)

Le statut du sous-locataire commercial est souvent perçu comme un statut précaire en ce que les droits que détient le sous locataire dépendent de ceux du locataire principal. La propriété commerciale s’en trouve d’autant plus fragilisée.

Aussi, afin d’appréhender une pratique répandue et pour conférer une certaine protection au sous-locataire, le statut des baux commerciaux réglemente la sous-location aux articles L.145-31 et L.145-32 du code de commerce, non sans poser comme principe que la sous location partielle ou totale est interdite, sauf stipulation contraire du bail.

En cas de sous-location autorisée, le sous-locataire tiendra certes ses droits du locataire principal et le sort du contrat de sous-location suivra généralement celui du bail principal. Toutefois, l’article L.145-32 précité reconnait un droit propre du sous-locataire à revendiquer la propriété commerciale, et dans certaines hypothèses, un droit direct du sous-locataire à l’égard du bailleur.

Les faits qui ont donné lieu à l’arrêt du 28 octobre 2009 constituent une parfaite illustration des droits et des difficultés attachés au statut du sous-locataire. En l’espèce, un bail commercial avait été conclu pour une durée de 53 ans. Aux termes de ce bail, la sous-location était autorisée, sous réserve de la notification au bailleur des actes de sous-location, par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée afin d’en assurer l’opposabilité. Une sous-location a été conclue. Le 19 avril 1994, le sous-locataire a cédé son fonds de commerce incluant le droit au bail, avec le concours du bailleur. Par acte du 7 avril 1999, le contrat de sous location a été renouvelé. Lorsque le bail principal s’est retrouvé résilié par le jeu de l’acquisition de la clause résolutoire, le sous-locataire a sollicité auprès du propriétaire bailleur le renouvellement de son bail. Le bailleur a refusé au motif que le renouvellement du 7 avril 1999 ne lui avait pas été notifié ; le sous-locataire a alors assigné le bailleur aux fins de se voir reconnaitre le droit à une indemnité d’éviction.

Les juges du fond ont fait droit à la demande d’indemnité d’éviction du sous-locataire, estimant que le bailleur avait participé à l’acte de cession du fonds de commerce portant cession du droit au bail et que l’acte de renouvellement de bail du 7 avril 1999 devait s’interpréter comme constituant une simple prolongation du contrat initial.

La Cour de cassation censure, en toute logique, au double visa des articles 1134 du code civil et L.145-32 du code de commerce, les juges du fond d’avoir ainsi statué « sans constater que l’acte de renouvellement du bail établi le 7 avril 1999 avait été notifié à la propriétaire conformément aux stipulations du bail principal, ou relever un acte clair et non équivoque établissant que cette dernière avait tacitement agréé le renouvellement du bail de la société sous locataire ».
Cet arrêt donne l’occasion de rappeler que le sous-locataire a un droit acquis au renouvellement sous réserve de respecter les formalités prévues à l’article L.145-32 du code de commerce (1) et, qu’en cas de disparition du bail principal, le sous-locataire peut opposer directement au propriétaire bailleur sa propriété commerciale (2).

1/ Le sous-locataire dispose d’un droit propre au renouvellement de son bail

L’article L.145-32 du code de commerce prévoit expressément que « le sous locataire peut demander le renouvellement de son bail au locataire principal dans la mesure des droits que ce dernier tient lui-même du propriétaire ».

Aux termes de cet article, le sous-locataire doit exercer ses droits à l’égard du locataire principal. Il n’y a donc pas de rapport direct entre le sous-locataire et le propriétaire. Tant que le locataire principal est titré, soit que son bail principal est en cours, soit qu’il a obtenu le renouvellement, le sous-locataire doit s’adresser à ce dernier notamment s’il entend demander le renouvellement du sous-bail.

A cet égard, le même article précise que « le Bailleur est appelé à concourir à l’acte comme il est prévu à l’article L.145-31 ».

Le sous-locataire se voit donc conférer un droit au renouvellement de son bail. Toutefois, l’opposabilité de son droit au bailleur est subordonnée à l’agrément express ou tacite de ce dernier. A défaut, le renouvellement est inopposable au bailleur et le sous-locataire n’acquiert aucun droit à la propriété commerciale.

En l’espèce, le bailleur déclarait que l’acte de renouvellement ne lui était pas opposable dès lors qu’il n’avait pas été appelé à concourir à l’acte et que l’acte de renouvellement ne lui avait pas été notifié.

La Cour d’appel avait estimé, de manière pour le moins critiquable que, dès lors que le bailleur avait participé à l’acte de cession portant cession du droit au bail et que l’acte de renouvellement ne constituait qu’une prolongation du contrat initial, le bailleur avait eu connaissance de la sous-location.

La tentative des juges du fond de vouloir sauver la propriété commerciale du sous-locataire cessionnaire en lui allouant une indemnité d’éviction est louable. Toutefois, le raisonnement retenu ne pouvait valablement prospérer dès lors qu’en l’absence d’agrément du bailleur à l’acte de renouvellement, le renouvellement lui était inopposable, et le sous locataire ne pouvait solliciter le versement d’une indemnité d’éviction.

Néanmoins, devant la Cour d’appel de renvoi, le sous-locataire pourra tenter d’établir que, par un acte clair et non équivoque, le bailleur a tacitement agréé au renouvellement du bail du sous-locataire, et ainsi opposer au bailleur sa propriété commerciale.

2/ Le droit direct du sous-locataire à l’égard du propriétaire bailleur

Il est des hypothèses, comme en l’espèce, où le sous-locataire peut opposer sa propre propriété commerciale au bailleur. Cette possibilité est expressément prévue à l’article L.145-32 alinéa 2 du code de commerce en ce qu’il dispose : « A l’expiration du bail principal, le propriétaire n’est tenu au renouvellement que s’il a, expressément ou tacitement, autorisé ou agréé la sous-location et si, en cas de sous location partielle, les lieux faisant l’objet du bail principal ne forment pas un tout indivisible matériellement ou dans la commune intention des parties ».

Le droit direct du sous-locataire à l’égard du propriétaire bailleur ne naîtra que si trois conditions sont réunies. Tout d’abord, la sous-location doit être régulière et le bailleur doit avoir été appelé à concourir tant à l’acte de sous-location qu’à son renouvellement. Ensuite, le bail principal doit avoir disparu. Enfin, si la sous-location est partielle, les locaux ne doivent pas être indivisibles matériellement ou dans la commune intention des parties.

En l’espèce, le sous-locataire a cherché à exercer son droit direct à l’égard du propriétaire bailleur puisque le bail principal avait disparu par le jeu de l’acquisition de la clause résolutoire. Le sous-locataire a donc sollicité le renouvellement de son bail. Face au refus du propriétaire, il a alors demandé le versement d’une indemnité d’éviction.

Le sous-locataire a donc tenté d’opposer sa propriété commerciale au bailleur afin d’obtenir le renouvellement de son bail ou, à défaut, une indemnité d’éviction (Cass. civ.3ème, 14 juin 2006, Administrer aout-sept. 2006, p. 40).

En l’espèce, la première condition faisait défaut : le bailleur n’ayant pas été appelé à l’acte de renouvellement, le sous-locataire ne disposait pas de droit direct à l’égard du propriétaire bailleur.

La solution peut sembler sévère. Pour autant, elle est conforme aux dispositions légales et aux règles d’opposabilité : le sous-locataire n’est pas fondé à revendiquer la propriété commerciale directement auprès du propriétaire bailleur si ce dernier n’a pas agréé expressément ou tacitement à la sous-location ou à son renouvellement.

Finalement, toutes les tentatives pour conférer un statut au sous-locataire, afin de le protéger et préserver sa propriété commerciale, ne sauraient retirer à la sous-location son caractère précaire, dépendant du bail principal et des décisions du locataire principal. Il reste en effet des hypothèses où le locataire principal pourra renoncer à son propre bail en exerçant son droit d’option c’est-à-dire en refusant le renouvellement, et si les locaux sont indivisibles, le sous-locataire perdra tous ses droits, sans recours contre le locataire principal.

En outre, en pratique, les baux prévoient souvent que les locaux sont indivisibles dans la commune intention des parties. Cette clause de style qui n’est la plupart du temps que totalement artificielle, permet ainsi de faire échec au droit direct du sous-locataire à revendiquer sa propriété commerciale.

Reste qu’en l’espèce, la situation du sous-locataire aurait pu être toute autre si ce dernier n’avait pas été aussi négligeant lors du renouvellement de son bail.

CORPORATE

Un plan d’options ne peut empêcher un salarié licencié d’exercer ses stock options
(Cass. soc., 21 octobre 2009, pourvoi n°08-42.026)

Nombreuses sont les sociétés qui lorsqu’elles fixent les conditions et les modalités d’exercice des stock options attribuéesà leurs salariés, souhaitent conditionner la levée de ces stock options à la présence du bénéficiaire au sein de la société. Elles insèrent alors fréquemment, dans leur plan d’options, une clause, dite « de présence », qui prévoit qu’en cas de départ du salarié attributaire (démission, départ à la retraite, licenciement…), ce dernier se trouvera privé du droit de lever tout ou partie de ses options. Les stock options qui ont pour but principal de fidéliser et de motiver les salariés d’une société en intéressant ceux-ci au capital, n’ont en effet plus lieu d’être lorsque le salarié quitte la société. Les juges ont d’ailleurs validé cette pratique en reconnaissant à plusieurs reprises la licéité de ce type de clauses (Soc. 20/10/2004, RJS 1/05, n°66). La chambre sociale de la Cour de cassation a même reconnu qu’une telle clause devait produire tous ses effets alors même que le licenciement était injustifié, le salarié ne pouvant prétendre, dans ce cas, qu’à des dommages et intérêts (Soc. 1er/12/2005, JCP S 2006, 1777, note Vatinet). Par un arrêt du 21 octobre 2009, la chambre sociale semble avoir radicalement changé sa position. Elle a en effet affirmé, sous le visa de l’article L.1331-2 du code du travail (interdiction des sanctions pécuniaires), que le fait de priver un salarié du bénéfice des stock options suite à son licenciement pour faute grave constitue une sanction pécuniaire prohibée qui ne pouvait donc être prévue dans un plan d’options. De prime abord, cette solution peut laisser perplexe. En effet, si la perte du bénéfice des options peut être aisément considérée, dans cette hypothèse, comme une sanction, cette sanction ne prive aucunement le salarié d’une partie de sa rémunération, ni d’une quelconque somme d’argent. Elle ne fait, en réalité, disparaître que l’espérance d’un gain, à savoir, la plus value qu’aurait réalisée le salarié s’il avait pu lever ses options. C’est donc par une conception très extensive des sanctions pécuniaires, que la chambre sociale neutralise aujourd’hui les clauses de présence prévues en cas de licenciement. Ce faisant, la Cour sonne-t-elle le glas de toutes les clauses de présence ? Pour les premiers commentateurs, les clauses qui n’auront pas le caractère d’une sanction, demeureront valables.

Rémunération des dirigeants : obligations pour les SA de se doter d’un comité de rémunérations
(Proposition de loi du 20/10/2009, Texte Ass. Nat. n °355)

Fer de lance du Gouvernement depuis le début de la Crise, et tout particulièrement de Madame la Ministre de l’Economie, la question de la rémunération des dirigeants a pris place, il y a quelques jours, à l’Assemblée nationale. Désireux de rendre les politiques de rémunération plus justes et surtout plus transparentes, les députés ont adopté, le 20 octobre dernier en première lecture, une proposition de loi tendant à imposer à certaines sociétés anonymes de se doter d’un comité des rémunérations. Le texte vise précisément les sociétés anonymes dépassant certains seuils de chiffre d’affaires et d’effectifs (qui seront fixés par décret) et dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé (« sociétés cotées »). La proposition de loi prévoit ainsi, pour les sociétés anonymes à Conseil d’administration, l’insertion d’un article L.225-35-1 dans le code de commerce. Le texte prévoit que le comité de rémunération devra être créé au sein du Conseil qui devra en déterminer la composition. Le comité devra en tout état de cause être formé des membres du Conseil à l’exclusion de ceux qui exercent des fonctions de direction (Président du Conseil d’administration, Directeur général,…). Un membre au moins du Comité doit être indépendant au regard de critères qui devront être précisés et rendus publics par le Conseil d’administration. Le comité agira sous la responsabilité du Conseil d’administration qui pourra néanmoins se substituer à lui. Ce comité aura pour mission de préparer toutes les décisions du Conseil d’administration portant sur les rémunérations des mandataires sociaux. Il aura notamment droit de formuler toutes recommandations à ce sujet. Le comité pourra tout particulièrement donner son avis sur la définition et la mise en œuvre des règles qui permettent de fixer les éléments variables de la rémunération et les avantages en nature, au sein de la société. Dans les sociétés anonymes à Directoire et Conseil de Surveillance, le comité de rémunérations sera une formation spécialisée du Conseil de surveillance et exercera ses fonctions dans les mêmes conditions (C. com. art. L.225-68-1).

DROIT FISCAL

Condamnation de la France à récupérer certaines aides d’Etat
(CJCE du 13 novembre 2008, affaire C-214/07 Commission europ éenne contre France)

Par décision du 16 décembre 2003, la Commission européenne déclarait les dispositions de l’article 44 septies du CGI, octroyant aux sociétés créées en vue de reprendre les activités d’entreprises industrielles en difficulté une exonération d’impôt sur les sociétés pour une période de deux ans, incompatible avec le droit communautaire et notamment le règlement relatif aux aides de minimis (69/2001).

A ce titre, la Commission a demandé à la France le remboursement immédiat de ces aides. C’est ce qu’a rappelé à la France la décision de la CJCE du 13 novembre 2008. Sur cette base, l’Administration fiscale adresse actuellement aux entreprises françaises ayant bénéficié des dispositions de l’article 44 septies du CGI, des demandes de restitution de solde d’impôt et offre en parallèle de trouver avec l’entreprise des mesures d’accompagnement.

Crédit d’impôt en faveur de la recherche - décision de rescrit
(rescrit 2009/53 ; FE du 15 septembre 2009)

L’administration a récemment fait preuve de réalisme (décision de rescrit 2009/53). Il s’agissait de savoir si les rémunérations allouées aux dirigeants non salariés, qui participent personnellement aux travaux de recherche de l’entreprise qu’ils dirigent, peuvent être prises en compte dans l’assiette de calcul du crédit d’impôt pour dépenses de recherche (CIR). S’appuyant sur une réponse ministérielle du 9 octobre 2008, l’Administration fiscale a répondu par la positive et accepté de prendre en compte les rémunérations des dirigeants, sous réserve qu’elles constituent des charges déductibles du résultat imposable de l’entreprise. Par conséquent, les rémunérations qui ne seraient pas déductibles du résultat fiscal ainsi que celles qui se rapportent à l’exercice des fonctions de dirigeant, ne peuvent être retenues dans l’assiette du CIR.

Pour les entreprises dont les bénéfices sont soumis à l’impôt sur le revenu, dans la mesure où la rémunération des dirigeants ne constitue pas une charge déductible du résultat imposable, et afin de ne pas pénaliser les petites entreprises, il est admis de retenir, pour le calcul du forfait des frais de fonctionnement, un forfait représentatif de la participation personnelle des dirigeants aux opérations de recherche.

Rappelons qu’à ce jour, concernant la définition des dépenses de personnel, l’administration se refuse à prendre en compte les avantages en nature ou encore les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation des salariés ainsi que les cotisations sociales y afférentes (tel que le forfait social dont le relèvement de 2% à 4% est prévu par le projet de financement de la sécurité sociale pour 2010).

Aides consenties à des sociétés étrangères
(CE, 7 septembre 2009 n°303560, SNC Immobilière GSE)

Sauf à justifier d’une contrepartie pour la société prêteuse, les avances sans intérêts consenties par une société mère française au profit d’une filiale étrangère sont considérées comme constitutives d’un acte anormal de gestion et les intérêts, auxquels la société mère a renoncé, comme un transfert indirect de bénéfices à l’étranger (CGI art.57). En l’espèce, une entreprise détenait des filiales au Portugal. Pour financer des « versements complémentaires » à leur capital, elle a eu recours à un emprunt dont elle déduisait les intérêts. Le fisc a estimé qu’elle aurait dû refacturer ces intérêts aux filiales concernées et a qualifié ces sommes d’avances sans intérêts constitutives d’un acte anormal de gestion. Toutefois, ces versements sont analysés en droit des sociétés portugais comme des éléments du capital qui en tant que tel ne peuvent donner lieu au paiement d’intérêts. Dès lors, la Haute Assemblée a invalidé la thèse de l’administration en considérant que de tels versements effectués par une société mère française au profit de ses filiales portugaises devaient être qualifiés juridiquement en fonction de la loi portugaise.

ENTREPRISES EN DIFFICULTE

Durée et expiration de la mission du commissaire à l’exécution du plan de cession
(Cass. com., 20 octobre 2009, pourvoi n°08-16.935)

L’arrêt rendu le 20 octobre 2009 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation précise, pour le régime antérieur à la réforme du 26 juillet 2005, la portée pour le commissaire à l’exécution du plan de l’ancien article L.621-66 du code de commerce qui stipule que la durée du plan de cession ne peut excéder 10 ans, sauf lorsque le débiteur est un agriculteur, ladite durée pouvant alors atteindre 15 ans.

Lorsque le jugement arrêtant le plan ne fixe pas de durée au plan, la mission du commissaire à l’exécution du plan dure jusqu’à la clôture du plan et ne peut en aucun cas excéder les durées maximales présentées plus haut. Peu importe, contrairement à ce qu’on pourrait supposer à la lecture de l’ancien article L.621-90 du code de commerce (qui stipule que la mission du commissaire dure jusqu’au paiement intégral du prix de cession), que le prix de cession ait été payé avant l’expiration du plan et de la mission du commissaire. Si le commissaire à l’exécution du plan a initié, avant l’expiration de sa mission, une action en paiement du prix, qui n’a pas encore abouti, cette dernière devra être poursuivie par un mandataire spécialement désigné, aux termes de l’article 90 du décret du 27 décembre 1985.

La question ne se pose plus depuis la loi du 26 juillet 2005 : les plans de cession sont désormais réservés au domaine de la liquidation judiciaire, la fonction de commissaire à l’exécution du plan de cession a désormais disparu.

Cession de créance à titre de garantie : étendue de l’engagement du cédant
(Cass. com., 20 octobre 2009, pourvoi n°08-18.233)

L’arrêt étudié traite de l’hypothèse de l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre d’un débiteur cédé dans le cadre d’une cession de créance « Dailly », à titre de garantie (art. L.313-23 et suiv. du code monétaire et financier). La Cour rappelle que le cédant, en qualité de garant solidaire, reste tenu vis-à-vis de son créancier, peu important que la créance cédée ait été déclarée au passif du débiteur cédé.

Le créancier n’a pas à justifier d’une poursuite judiciaire contre le débiteur cédé, ni même de sa mise en demeure. On rappelle qu’il est simplement tenu, après avoir notifié la cession au débiteur cédé, « de justifier d’une demande amiable adressée à ce débiteur ou de la survenance d’un événement rendant impossible le paiement », aux termes d’un arrêt de la Cour de cassation du 14 mars 2000.

Interruption des instances : maintien de la juridiction initialement saisie
(Cass. com., 3 novembre 2009, pourvoi n°08-20.490)

Les articles L.622-21 et L.622-22 du code de commerce prévoient le mécanisme d’interruption et de reprise des instances en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde (ou par renvoi des articles L.631-14 et L.614-3 du même code, d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire) : la réforme de 2005 n’a pas modifié le mécanisme ; les instances tendant à la condamnation du débiteur à un paiement ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement sont interrompues, puis reprises de plein droit après déclaration de la créance, les mandataires de justice appelés à la cause, mais ne tendent plus qu’à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

L’arrêt étudié précise le rôle de la juridiction initialement saisie : il lui incombe de vérifier que le créancier a effectivement déclaré sa créance ; à défaut, l’instance ne serait pas valablement reprise. Elle doit ensuite se prononcer sur l’existence et le montant de la créance. Il convient de plus de préciser que l’interruption de l’instance n’équivaut pas à un dessaisissement de la juridiction initialement saisie. Elle ne saurait donc se déclarer incompétente et laisser au juge-commissaire le soin de fixer la créance. Cette solution est valable quelle que soit la juridiction initialement saisie ; elle vaut donc également, comme c’est le cas en l’espèce, pour le juge de proximité.

CONTRATS COMMERCIAUX

Dette partiellement garantie par un gage et imputation des paiements
(Ass. plén., 6 novembre 2009, pourvoi n°08-17.095)

Lorsqu’une dette n’est garantie que partiellement par une sureté, en l’espèce un gage, les paiements effectués par le débiteur s’imputent-ils en priorité sur la partie non garantie de la dette ?

Telle était la question de principe posée à la Cour de cassation réunie en Assemblé plénière par suite du refus de la cour d’appel de renvoi de s’incliner devant la solution énoncée par la première chambre civile en 2005. Cette dernière avait jugé que le versement devait d’abord s’imputer, en l’absence de clause contraire, sur la portion non garantie de la dette née de l’autorisation de découvert, de sorte que le gage n’était pas éteint, la dette garantie fût-elle remboursée.

L’Assemblée plénière adopte une position contraire et décide que « lorsqu’un gage garantit partiellement une dette, le versement résultant de sa réalisation s’impute sur le montant pour lequel la sûreté a été consentie ». Mais il est vrai qu’en l’espèce, la convention de crédit prévoyait que les meubles étaient affectés à la garantie de toutes les sommes dues par l’emprunteur à la banque au titre de l’autorisation de découvert de 250.000 Frs en principal, plus intérêts, commissions, frais et accessoires. Ainsi, aux termes de cette convention, les parties avaient exprimé la volonté de limiter le gage à l’autorisation de découvert. La Cour en a logiquement déduit que le dépassement de découvert par suite de tolérances ayant été accordées par la banque n’était pas garanti par le gage.

Exclusion de la théorie du mandat apparent pour les actes notariés
(Cass. civ. 1ère, 5 novembre 2009, pourvoi n°08-18.056)

Le mandat apparent permet de considérer que le mandant est engagé au-delà des pouvoirs conférés au mandataire. La condition de son admission est que la croyance du tiers à l’étendue des pouvoirs du mandataire soit légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs.

Dans l’arrêt rendu le 5 novembre dernier, la Cour de cassation affirme que « le mandat apparent ne peut être admis pour l’établissement d’un acte par un notaire instrumentaire avec le concours d’un confrère, les deux officiers publics étant tenus de procéder à la vérification de leurs pouvoirs respectifs ».

Les quasi-contrats : rappel des conditions d’ouverture
(Cass. civ. 1ère, 5 novembre 2009, n°08-16.497 et Cass. civ. 1ère, 22 octobre 2009, n°08-18.331)

Les deux quasi-contrats que sont l’enrichissement sans cause et la gestion d’affaires ont donné lieu à deux arrêts relatifs à leurs conditions d’ouverture.

Dans un arrêt rendu le 22 octobre dernier au visa de l’article 1372 du code civil, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle une solution bien établie selon laquelle « la gestion d’affaires suppose que le gérant ait accompli pour le compte du maître un acte utile sans y être légalement ni contractuellement tenu ». Ce faisant, elle casse l’arrêt d’appel ayant retenu la gestion d’affaires alors qu’il était avéré que le prétendu gérant avait agi sur les instructions de la personne pour laquelle il était intervenu.

L’arrêt rendu le 5 novembre 2009 est relatif aux conditions d’ouverture de l’enrichissement sans cause. On le sait, le succès d’une telle action suppose, entre autres, que l’enrichissement et l’appauvrissement corrélatif soient dépourvus de cause ; tel n’est pas le cas lorsque l’enrichissement a sa source dans un acte juridique qui le légitime. En l’espèce, l’occupant d’un appartement avait assigné, sur le fondement de l’enrichissement sans cause, le propriétaire en remboursement des travaux d’aménagement qu’il avait financés. Constatant qu’’il s’était engagé en vertu d’un accord verbal à financer lesdits travaux en contrepartie d’un droit d’usage et d’habitation des lieux, les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, l’ont débouté de sa demande.

CONCURRENCE ET DISTRIBUTION

Application des règles du code du travail au franchisé
(Cass. soc., 16 septembre 2009, pourvoi n°07-45.289)

Les articles L.7321-1 et suivants du code du travail rendent applicables aux « gérants de succursale » les dispositions dudit code. Sont notamment qualifiées de gérants de succursale les personnes dont la profession consiste essentiellement, soit à vendre des marchandises qui leur sont fournies exclusivement ou presque par une seule entreprise, soit à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.

Ces dispositions font partie des règles auxquelles il convient que les franchiseurs prennent garde, tant dans la rédaction de leur contrat de franchise que dans sa mise en œuvre ; c’est ce que rappelle la décision faisant l’objet du présent commentaire, rendue sur le pourvoi formé à l’encontre d’un arrêt d’appel ayant fait application desdites dispositions à un franchisé. De façon classique, le pourvoi reprochait notamment à la Cour d’appel d’avoir fait application des dispositions précitées du code du travail alors qu’il avait été démontré que le franchisé exerçait une activité indépendante. Sans surprise, cet argument est écarté par la Cour de cassation qui rappelle que les dispositions du code du travail sont applicables dès lors que les conditions posées par l’article L.7321-2 du code du travail sont remplies, sans qu’il soit nécessaire d’établir un lien de subordination.

L’arrêt apporte une précision sur les conséquences de la qualification de « gérant de succursale » : le contrat de franchise étant visé par les dispositions des articles L.7321-1 et suivants du code du travail, le remboursement du droit d’entrée se rattache à un contrat soumis au droit du travail et doit, par conséquent, être garanti par l’AGS.

Société coopérative et modification dans la situation juridique de l’employeur
(Cass. soc., 29 septembre 2009, pourvoi n°08-40.649)

La présente décision offre un autre exemple de l’interférence que peut avoir le droit du travail dans le droit de la distribution. On sait que, par l’effet de l’article 1224-1 du code du travail, en cas de modification de la situation juridique de l’employeur, les contrats de travail en cours au jour de la modification sont transmis au nouvel employeur. L’espèce faisant l’objet de la décision commentée concernait l’employée d’une société coopérative licenciée pour motif économique. En effet, la société coopérative avait cessé son activité suite à la disparition de l’enseigne qu’elle fournissait exclusivement. Selon la salariée, son contrat aurait dû se poursuivre avec le nouveau fournisseur des anciens adhérents de la coopérative. Les juges du fond ayant rejeté cette argumentation, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel : les juges auraient dû rechercher si le nouveau fournisseur n'avait pas repris la clientèle de la coopérative, ce qui aurait été de nature à caractériser un transfert de l'entité économique exploitée par cette dernière.

Liquidation de l’astreinte attachée à l’exclusivité territoriale
(Cass. com., 22 septembre 2009, pourvoi n°08-19.281)

Afin d’assurer le respect des obligations qu’ils jugent essentiels, les contractants peuvent assortir ces dernières, notamment, d’une astreinte. L’arrêt commenté est l’occasion de rappeler que les contractants prévoyant une telle astreinte doivent être précis dans les termes qu’ils emploient.

En l’espèce, l’astreinte était attachée à l’exclusivité territoriale d’enseigne et le débiteur avait accordé son enseigne à deux magasins situés sur le territoire. L’astreinte est néanmoins identique à celle qu’elle aurait été si un seul magasin tiers avait bénéficié de l’enseigne, étant prévue par jour et non par infraction.

PERSONNES ET PATRIMOINE

Protection renforcée du nom patronymique et œuvre caricaturale
(Cass. civ. 1ère, 8 octobre 2009, pourvoi n°08-10.045)

Par cet arrêt, la Cour de cassation précise les contours de l’utilisation du nom patronymique dans les œuvres de fiction. La Cour d’appel de Versailles rappelait, à juste titre, que « le nom patronymique d’une famille donne à ses membres le droit de s’opposer à l’utilisation faite par un tiers à des fins commerciales ou dans des œuvres de fiction, pourvu toutefois que le demandeur justifie d’une confusion possible ». Cette dernière avait alors estimé qu’un tel risque n’existait pas en l’espèce, le nom patronymique « de KERSAINT » étant la dénomination d'au moins quatre communes du Finistère et les deux prénoms féminins invoqués étant courants (l'un en Bretagne, l'autre dans la France entière). Elle en avait conclu qu’aucune méprise n'était possible entre le demandeur et le personnage de l'œuvre. Or, la Cour de cassation a censuré cette analyse au motif que, si effectivement, il n’existe pas de risque de confusion entre Monsieur de KERSAINT ou ses proches avec les personnages de l’œuvre de fiction, il n’est pas exclu que ce risque existe concernant le nom patronymique « de KERSAINT ».
La Cour de cassation, par cet arrêt, s’érige en protectrice du nom de famille, protection qui se doit d’être renforcée, comme cela est le cas en l’espèce, lorsque le risque de confusion concerne des personnages ridicules, odieux ou néfastes, ce qui pourrait avoir pour conséquence de discréditer le nom de famille.

L’incidence de la modification d’une mission d’expertise sur le délai de prescription
(Cass. civ. 2ème, 22 octobre 2009, pourvoi n°08-19.840)

Il résulte des dispositions de l’article L.114-2 alinéa 2 du code des assurances que la prescription de l'action en règlement d'un sinistre est interrompue par la désignation d'un expert dans les rapports entre assureur et assuré. Ainsi, à la lecture de cet article, on aurait pu penser que seule la désignation d’un expert pouvait interrompre la prescription. Pourtant, dès 2001 s’annonçaient les prémices d’une évolution jurisprudentielle, confirmée par le présent arrêt. La Cour de cassation énonce que « toute décision judiciaire apportant une modification quelconque àune mission d'expertise ordonnée par une précédente décision a un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties et pour tous les chefs de préjudices procédant du sinistre en litige ». Dès lors, les modifications de la mission de l’expert, résultant d’ordonnances successives, font courir un nouveau délai de prescription pour tous les préjudices afférents au sinistre, pour toutes les parties et, enfin, pour toutes les actions de chacun des assureurs contre les assurés que ces dernières soient en rapport ou non avec le sinistre.

La répétition de l'indu sur une succession s’effectue à proportion de la part successorale
(Cass. civ. 1ère, 12 novembre 2009, pourvoi n°08-18.338)

Dans cet arrêt, la Cour de cassation est appelée à se prononcer sur le point de savoir si le recouvrement d'une retraite indûment versée après le décès de son bénéficiaire peut incomber ou non à l’un des héritiers du défunt. En d’autres termes, il s’agit de savoir si chaque cohéritier peut être tenu à hauteur de sa part de la dette litigieuse. En l’espèce, la caisse de retraite avait continué à verser à Madame X sa retraite sur son compte bancaire.

Dès le constat de cette erreur, elle avait assigné la fille de la défunte, sur le fondement de la répétition de l'indu. La Cour de cassation a débouté la caisse de retraite, considérant que les arrérages de pension versés sur le compte bancaire étaient tombés dans la succession. Dès lors, la fille de la défunte n'étant pas la seule héritière, elle ne pouvait être tenue qu'à proportion seulement de sa part dans la succession.

SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES

L’offre de reclassement du salarié malade doit intervenir après la seconde visite de reprise
(Cass. soc., 28 octobre 2009, pourvoir n°08-42.804)

Un salarié en arrêt de travail prolongé en raison d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail ne peut être licencié sans que soit respectée une procédure très stricte. L’article L.1226-10 du code du travail prévoit en effet une obligation préalable de reclassement à la charge de l’employeur, les propositions de reclassement devant prendre en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Une question se pose : à quel moment doit intervenir la proposition de reclassement dans l’hypothèse où, par exemple, le salarié serait déclaré inapte à l’issue de la première visite de reprise? La Haute juridiction rappelle de manière ferme que la proposition de reclassement doit intervenir après la seconde visite de reprise auprès de la médecine du travail à l’issue de laquelle l’inaptitude sera prononcée. Une proposition de reclassement intervenant avant la seconde visite médicale rend ainsi le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement sans cause réelle et sérieuse.

La prise d’acte de rupture du contrat de travail par le salarié ne peut être rétractée
(Cass. soc., 14 octobre 2009, pourvoi n°08-42.878)

Le contrat de travail peut être rompu par le salarié par plusieurs mécanismes : la démission, la résiliation judiciaire et la prise d’acte de la rupture du contrat de travail.

Dans l’hypothèse où l’employeur n’exécuterait pas ses obligations légales, le salarié peut prendre acte de la rupture de contrat de travail aux torts de ce dernier. La jurisprudence a précisé le régime juridique de ce mode de rupture. Si les faits invoqués justifient la prise d’acte, celle-ci produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. A défaut, la prise d’acte produira les effets d’une démission (Cass. soc., 25 juin 2003, pourvoi n° 01-42679). A l’occasion d’un arrêt en date du 14 octobre 2009, la jurisprudence a précisé une nouvelle fois les conséquences de la prise d’acte du contrat de travail sur le lien entre le salarié et l’employeur. En l’espèce, un salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail. Quelques jours plus tard, ce dernier a été déclaré inapte à son poste de travail. A cette occasion, le salarié a adressé un courrier à son employeur annulant ladite prise d’acte et lui demandant de tirer les conséquences de cet avis d’inaptitude. Licencié pour faute grave, le salarié a tenté de faire valoir la prise d’acte de rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur. Non seulement les juges du fond ont estimé que la prise d’acte produirait les effets d’une démission et ont ainsi débouté le salarié de ses demandes, mais la Cour de cassation a ajouté que « la prise d’acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu’il reproche à son employeur entraîne la rupture immédiate du contrat de travail, qu’il s’ensuit qu’elle ne peut être rétractée (…) ».

La date de rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur
(Cass. soc., 14 octobre 2009, pourvoi n°08-44.052)

Les dates indiquées tant aux termes des contrats de travail qu’aux termes des courriers envoyés aux salariés ont leur importance et ne doivent pas être omises au regard de leurs conséquences. L’arrêt d’espèce en est une parfaite illustration. Les parties au contrat de travail avaient convenu d’une clause de non-concurrence qui prévoyait une faculté de renonciation au bénéfice de l’employeur à la condition d’en informer le salarié au plus tard à la date de rupture. L’employeur a mis fin au contrat de travail par courrier remis au salarié le 11 août avec effet au 13 suivant. L’employeur a renoncé au bénéfice de la clause de non-concurrence par lettre en date du 13 août. Cependant, le salarié a saisi le Conseil de Prud’hommes afin d’obtenir le versement de la contrepartie à la clause de non-concurrence. La Haute juridiction a accueilli sa demande au motif que « la rupture d’un contrat de travail se situe où l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin », soit le 11 août, le différé au 13 août étant sans incidence.

IMMOBILIER

Bail commercial et effet d’un congé-sanction insuffisamment motivé
(Cass. civ. 3ème, 28 octobre 2009, pourvoi n°07-18.520)

Il est parfois bien opportun de rappeler les règles fondamentales en matière de baux commerciaux. C’est ce que vient de faire la Cour de cassation concernant la sanction attachée à un congé avec refus de renouvellement pour motifs graves et légitimes qui aurait été insuffisamment motivé.

En l’espèce, un bailleur avait fait précéder son congé avec refus de renouvellement d’une mise en demeure exigeant des « remises en état », sans autre précision. Le preneur avait alors assigné son bailleur pour voir annuler le congé.

Les juges du fond estimant que la mise en demeure ne permettait pas au preneur de se mettre en conformité avec les clauses du bail dans le délai imparti et que le refus de renouvellement n’était pas suffisamment motivé, le bail se trouvait renouvelé. La Cour de cassation censure au motif que « l’absence ou l’insuffisance de motivation d’un congé avec refus de renouvellement pour motifs graves et légitimes sans offre d’indemnité d’éviction laisse subsister le congé et le droit pour le preneur de prétendre au paiement d’une indemnité d’éviction ». L’arrêt, conforme à la jurisprudence, ne peut être qu’approuvé.

Mise en œuvre de la garantie des constructeurs en cas de sous-traitance
(Cass. civ. 3ème, 20 octobre 2009, pourvoi n°08-15.381)

La Cour de cassation vient de préciser qu’en matière d’assurance construction, la présence ou la convocation d’un sous-traitant à la réception, acte auquel il n’est pas partie, n’est pas une condition de mise en œuvre de la garantie des assureurs. En l’espèce, une société qui s’était vue confier, en qualité de sous-traitant, des travaux de peinture anti-corrosion, avait chargé une autre société de la réalisation des travaux de finition. La société sous-traitante a dû reprendre les désordres qui affectaient les travaux réalisés par la seconde société et a assigné l’assureur de cette dernière aux fins d’obtenir une indemnisation pour les sommes qu’elle avait dû exposer au titre des reprises.

Les juges du fond ont débouté la société demanderesse aux motifs que le contrat d’assurance ne prévoyait que le paiement des travaux de réparation des dommages matériels affectant, après réception, l’ouvrage exécuté par son assuré et que les procès-verbaux de réception ne pouvaient valoir réception à l’égard de la société défenderesse dès lors qu’elle n’était ni présente, ni convoquée aux opérations de réception.

La Cour de cassation censure en toute logique : le sous-traitant n’a pas à être appelé ou présent à la réception pour faire jouer la garantie de son assureur.

De nouvelles obligations à la charge des syndics ?
(Réponse ministérielle n°50067 du 13 octobre 2009 et dépêche REUTERS du 26 octobre 2009)

Les Syndics de copropriété seraient-ils dans la ligne de mire des pouvoirs publics ?

Aux termes d’une réponse ministérielle en date du 13 octobre 2009, le secrétaire d’état chargé de l’industrie et de la consommation a indiqué avoir mandaté le Conseil National de la Consommation (CNC) pour mener une réflexion sur les conditions de désignation et de changement de syndics.

La réflexion portera notamment sur la possibilité de mettre en place une période d’essai lors de la désignation d’un nouveau syndic par assemblée générale. Par ailleurs, le secrétaire d’état a également indiqué qu’avant la fin du premier trimestre 2010, un arrêté fixera la liste des prestations de syndics couvertes par le forfait payé chaque année par les copropriétaires. Pour certains professionnels, cette nouvelle réglementation est vécue comme une trahison.

PROCEDURE CIVILE ET VOIES D’EXECUTION

Exception de procédure et procédure orale
(Cass. civ. 2ème, 1er octobre 2009, pourvoi n°08-14.135)

Par application de l’article 74 alinéa 1 du code de procédure civile, les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Cette règle signifie que, dans le cadre de procédure écrite, les exceptions doivent être citées in limine litis dans les écritures, c’est-à-dire préalablement à tout moyen de défense au fond ou fin de non-recevoir.

La question de la recevabilité des exceptions de procédure se pose différemment dans le cadre des procédures orales.

En effet, la jurisprudence considère que, lorsque les procédures sont orales, les exceptions de procédure peuvent être invoquées à l’audience.

Ainsi, selon la Cour de cassation, c'est à tort qu'une cour d'appel a déclaré irrecevable l'exception d'incompétence soulevée à la barre du tribunal au motif que la partie avait transmis au préalable des conclusions écrites sur le fond (Cass. 2e civ., 16 oct. 2003, Juris-Data n°020557).

C’est ce même principe qui a été rappelé par la Cour de cassation dans son arrêt du 1er octobre 2009. Dans cette affaire, la Haute juridiction a cassé et annulé un arrêt de la cour d’appel de Fort-de-France qui a déclaré irrecevable l’exception de procédure invoquée postérieurement au dépôt d’un recours en annulation développant des moyens de fond. En effet, dans le cadre des procédures orales, l’ordre des moyens de défense est apprécié au jour de l’audience des plaidoiries.

Irrecevabilité des conclusions pour dissimulation d’adresse
(Cass. civ. 2ème, 1er octobre 2009, pourvoi n°08-12.417)

Conformément aux dispositions des articles 960 et 961 du code de procédure civile, les conclusions d’appel doivent indiquer le domicile de la partie, personne physique, concernée ainsi que ses nom, prénoms, profession, nationalité, date et lieu de naissance.

La jurisprudence considère à ce titre que si l'appelant ne justifie pas de la réalité de son domicile et persiste à refuser de faire connaître son domicile actuel, ses conclusions doivent être déclarées irrecevables (CA Nancy, 27 mars 2007, Juris-Data n°339681).

C’est ce que rappelle la Cour de cassation, par arrêt en date du 1er octobre 2009.

En effet, dans cette décision, la Cour de cassation, après avoir constaté dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation et au vu de la lettre d’un huissier de justice produite par l’intimé que, d’une part, l’appelante n’était pas domiciliée au lieu mentionné dans ses dernières écritures et que, d’autre part, elle dissimulait son adresse actuelle, a déclaré les conclusions d’appel irrecevables et l’appel non soutenu.

Acte de notification et modalités de recours
(Cass. civ. 2ème, 10 septembre 2009, pourvoi n°07-13.015)

Selon l’article 680 du code de procédure civile : « L'acte de notification d'un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé (…) ».

A ce titre, la Cour de cassation considère que doit être précisé dans l’acte de notification le siège de la juridiction devant laquelle doit être porté le recours. En effet, et comme le précise la Haute juridiction, aux termes d’un arrêt en date du 10 septembre 2009, constitue une modalité de recours le lieu où celui-ci doit être exercé.

PROPRIETE INTELLECTUELLE

Vente de produits contrefaisants sur eBay hors réseaux de distribution sélective
(CA Paris, 6 novembre 2009, RG n°08/06015)

Dans cette affaire, une personne vendait sur le site de vente aux enchères eBay des parfums revêtus des marques appartenant aux sociétés L’oréal et à sa filiale Lancôme, apposées sur des produits non authentiques. Ces dernières ont alors agi à l’encontre du vendeur sur le fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale. Le jugement du TGI de Paris ayant fait droit à ces demandes est partiellement confirmé.

La Cour d’appel retient la contrefaçon par reproduction. E

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